Nova Express Records // Kaiser Hunters For Royal Beavers


Label géré de main de maître par l’expérimenté et ingénieux Lucas Trouble, Nova Express Records, basé à Chagny, nous a déjà réjoui avec les albums de formations telles que Plastic Invaders, clermontois au rock’n’roll racé et furibard, ou encore les Franc-Comtois de Wayward Gentlewomen et leur rock réminiscent des Violent Femmes. Son catalogue est large et de qualité constante et Lucas Trouble a de plus la bonne idée de sortir ça et là des compilations présentant ses groupes, dont celle décrite en ces lignes, qui en dévoile quatre pour la bagatelle de vingt-trois titres. On est donc gâtés et là encore, de superbes découvertes nous sont réservées, à commencer par les clermontois de Gadwin, le gang des frères Rigaud, pour ensuite enchaîner avec The Marshmallow Dykes, de Paris, The Denyals, de Lille, et pour finir, les marseillais de Happy Family.
C’est donc Gadwin, auteur d’un superbe album ("NoObjEctiON") il y a déjà un moment, qui nous balance cinq titres d’un rock grungy, délibérément 90’s et qui par leur qualités éveillent chez l’auditeur une vive nostalgie de cette époque riche en groupes aux guitares torturées et aux productions délicieusement approximatives. Le trio montre, en plus de cela, une étonnante capacité à convaincre dans un registre plus nuancé (Against you), ou plus massif (Open), ou encore saccadé (Rose Red), les voix de Frank et Frédéric Rigaud, adroitement épaulés par la batterie d’ Alexandre Sawicki, contribuant incontestablement au pouvoir de séduction des Auvergnats, qui finissent sur un Behind bien positionné entre délicatesse acoustique et envolées mélodiques plus électrisées.
Excellente entrée en matière donc, que les Marshmallow Dykes se chargent de prolonger en proposant eux aussi cinq morceaux taillés dans leur «Tenebrae Rock'n'Rollae » comme ils se plaisent à le définir, de façon très juste, sur leur Myspace. C’est un Black Surf très Cramps qui ouvre le bal, surf comme son nom l’indique, et très convaincant. Leur répertoire se situe à la croisée du rockabilly et d'un psycho-punk, évoquant, c’est un atout supplémentaire, les Washington Dead Cats. Subtilité et attitude nettement plus « wild » font ici bon ménage et le quatuor encanaillé par la voix Murdock DK nous gratifie entre autres d’un Paris City Girls digne des pointures du genre, ou d’un Foxy Knoxy percutant, à la fois déviant et distingué, qui donne envie d’en entendre plus, sachant que la formation a sorti un album.

Seconde trouvaille notable donc, à laquelle succèdent les Denyals, dont je connais d’ores et déjà les aptitudes pour les voir vus en live, il y à peine un mois, dans un caf’conc’ de ma ville. Leur prestation avait été de belle facture, rock à souhait, sans fioritures superflues, et le trio drivé par les sympathiques Erreïp (ex-Waterguns) et No (ex-Clerks) ne se prive pas de confirmer les promesses affichées par ce concert. Inspiré et ne s’en tenant pas à un format figé, loin s’en faut, le rock de ces potes d’autres excellentes formations telles que Billy Gaz Station ou Jettators nous met en joie quel que soit le chemin emprunté. Et s’ils débutent avec un Suzy R à l’énergie punk bienvenue, riffant comme on l’aime, frontal et sans failles, les nordistes déploient un talent certains dans des sonorités plus apaisées (Dead Birds) bien que toujours vitriolées par ces guitares insubordonnées, renouant ensuite avec un rythme plus affirmé sur le valeureux The Same Old Song. Simple, bien ficelé, massif en certaines occasions (Down In The Sewer et son riff remarquable), le rock des Denyals fait mouche à chaque titre et si l’on est heureux d’en avoir ici huit à se mettre sous la dent, on n’en attend qu’avec plus d’impatience la sortie d’un premier long-jet. Impatience aiguisée par Memories, alerte, entre voix punky et guitares aussi fines que tranchantes, ou ce Who Killed the Idiot aux gimmicks presque funky, noyés dans le flux d’un rock vif, urgent, qui m’évoque brièvement Mark E.Smith et The Fall. La comparaison est bien évidemment à porter au crédit des lillois, lesquels nous livrent ensuite un I Want You lui aussi remuant, qui vient s’ajouter à la liste de leurs réussites, puis un Foretaste instrumental aux motifs géniaux.
Enfin, c’est aux phocéens de Happy Family que revient la tache de clôturer les festivités, et le groupe fondé par l’iranien Serge Fhontransmani se montre largement à la hauteur de ses prédécesseurs en nous offrant cinq morceaux oscillant entre grunge, garage, punk et acoustique suivie d’envolées noisy superbes (superbe U & I). Le groupe cite des influences multiples, et on se rend compte à l’écoute qu’il les a parfaitement assimilées. Leur Cum’ Down introductif, fonceur et semblable par son allant à certains titres des Denyals, allie mélodies et rudesse rock avec bonheur, puis Let the Boys évolue dans ce même domaine, attractif au vu de l’équilibre trouvé entre prétentions mélodiques et écarts plus rock, noisy, qui fleurent bon les 90’s. Arrive ensuite un Sides Of Men aux riffs secs, vivace et lui aussi immédiatement convaincant, doté d’une guitare volubile et captivante. Puis c’est Pay To Play, aux rythmes changeants, d’abord modéré puis plus vigoureux, qui ferme la marche avec brio.

Excellente compilation donc, le contraire eut été surprenant s’agissant d’une telle structure, généreuse et de haute qualité, qui suscite d’une part l’incoercible envie de découvrir plus en avant les groupes qui y figurent, et d’autre part de se plonger dans les productions Nova Express, dont je peux vous dire qu’elles satisferont à coup sur leurs auditeurs, qu’on espère nombreux.

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